L'immobilisme peut-il être une vertu ?
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Tout, absolument tout, aura été reproché à Nicolas Sarkozy. Et tout, absolument tout, est déjà reproché à François Hollande. La stratégie de ce dernier diffère pourtant fondamentalement de celle de son prédécesseur. Il est bien trop tôt pour la condamner même si elle ne semble pas adaptée aux circonstances...dans l'immédiat.
En 2007 le cap est clair : fini le style protecteur des douze années de règne de Jacques Chirac. Nicolas Sarkozy réhabilite une pratique florentine secrète et très personnelle, héritée d'un modèle de pouvoir largement ciselé par François Mitterrand. Avec, en plus, un recours assumé aux électrochocs et une mise en scène de l'intimité sans précédent pour un Président de la République (VGE, pourtant désireux dès 1974 de "moderniser" le rapport du Président au citoyen et encourageant ainsi le talent des humoristes fait, en comparaison avec le "avec Carla c'est du sérieux" du vainqueur de 2007, figure d'ascète de la communication).
De 2007 à 2012 le bon élève français annonce donc les réformes face à une crise sans précédent. C'est justement le bon moment, pour ceux qui défendent les choix du précédent quinquennat, sans parler de tous ceux qui pensent qu'il faut aller encore plus loin et surtout, plus vite. Et tant pis pour les esprits chagrins voulant préserver l'unité nationale (si elle a jamais existé) par une approche pédagogue voire plus sociale. Pour les défenseurs de Nicolas Sarkozy, il était définitivement le meilleur président possible pour maintenir la France à flots dans le pire des contexte économiques possibles.
François Hollande modifie à son tour la pratique élyséenne et il a le mérite de l'assumer totalement. "Rien ne sert de mourir guéri" avançait déjà celui qui n'était pas encore aux affaires. Et ce fin connaisseur des Français, qui partage de nombreuses affinités avec Chirac à commencer par la bonne chère et le contact avec l'habitant dans toutes les provinces (voir notre article d'avril 2011 ici : François Hollande ), pense qu'on ne force pas les Français à changer, on les laisse comprendre tout seuls. C'est plus long qu'ailleurs et ne va pas sans heurts. Mais une fois le consensus obtenu, tout va plus vite, et tout dure plus longtemps que dans des pays qui ont réformé sabre au clair. C'est sa conviction.
Aujourd'hui personne ne sait si ce sont les Britanniques, les Allemands ou encore...les Français qui font les bons choix. La crise révélée en 2007/2008 par les marchés internationaux est un mouvement profond qui appelle de la part des pouvoirs politiques et économiques une endurance qu'ils n'ont probablement jamais eu l'occasion de tester à ce point.
Alors si Nicolas Sarkozy était l'homme du moment sous son quinquennat, François Hollande pourrait être sous le sien, la bonne personne au bon moment. Probablement pas le meilleur entraîneur pour gagner dans dix ans la compétition sans pitié qui se joue à l'échelle mondiale. Mais probablement le meilleur pour ne pas essouffler à court terme les joueurs dans une première phase de jeu longue et très éprouvante, qui durera au moins jusqu'à la fin de ce quinquennat.
31 mai 2013